Charles Yvon a repris en 2018, l’entreprise familiale spécialisée dans le parapluie haut de gamme, qu’il ne cesse de développer aujourd’hui. Ambassadeur déterminé du Made in France, il est aussi un membre engagé et influent des FFI. Interview.

Un parapluie qui résiste à des vents de 156km/h de face !
  • Forces Françaises de l’industrie : Pouvez-vous vous présenter
  • Charles Yvon : « Je suis le Président de la société normande Le Parapluie de Cherbourg. Il s’agit d’une entreprise familiale située dans le centre ville de Cherbourg dans la Manche, spécialisée comme son nom l’indique dans la fabrication de parapluies. Je suis issu d’une famille de tanneurs depuis 1800, de pères en fils, donc nous sommes bien ancrés dans le territoire local. L’entreprise a été créée par mon père en 1986. Je l’ai rachetée en 2018. J’en ai repris la direction et la présidence. 
  • FFI  : Quel est votre parcours ? 
  • CY : Je suis à l’origine plutôt un scientifique. J’ai un bac S.  J’ai étudié la physique et les maths. En 2009, mon père voulait faire un parapluie encore plus solide que les autres. La partie résistance des matériaux m’intéressait déjà beaucoup. Je me suis renseigné, j’ai discuté avec des ingénieurs dans tout ce qui est usinage, carbone, tissus. J’ai eu envie alors de rentrer dans l’entreprise. J’ai repris des études davantage axées, cette fois, sur le commerce. J’ai une licence d’économie gestion et  j’ai décroché un bachelor à l’Ecole de Commerce de Grenoble – j’ai été élu entrepreneur de l’année en 2019 devant 7 000 étudiants, c’était de la folie-  Ensuite, j’ai passé un double master en communication et marketing que j’ai terminé en 2015 et je me suis engagé à 100% dans la boite. Je continue à apprendre et à me former. L’année dernière,  j’ai suivi une formation à l’IHEMI – Institut des hautes études du ministère de l’Intérieur-. Et en début d’année, j’ai fait l’IHEDN – l’Institut des Hautes Etudes de la Défense Nationale. Je suis un touche à tout  très curieux !

Une trentaine de salariés pour un CA de 2,5 millions d’€ par an en constante augumentation

  • FFI : La croissance de la société est impressionnante
  • CY :  Je suis très attaché à la qualité de nos produits, tous « made in France ». Nous avons depuis peu le label Entreprise du Patrimoine Vivant, la certification « Origine France Garantie » et l’indication du Made in France des douanes.  Nous fabriquons 20 000 parapluies par an sur place. En 2018, nous étions sur un rythme de production de 6 000 unités par an. La progression est importante, et elle ne cesse de croître.  J’ai travaillé sur l’atelier, l’outil de production. On a beaucoup réorganisé en interne pour produire plus dans de meilleures conditions. A ce jour, nous sommes une trentaine de salariés pour un chiffre d’affaires de 2,5 millions d’euros. Nous gérons tout nous mêmes, y compris l’expédition de nos produits.
Un atelier de fabrication situé dans le centre ville de Cherbourg et qui se visite !

De l’Elysée à l’international, la marque est partout connue

  • FFI : Comment êtes-vous organisé pour la distribution ? 
  • CY : Nous avons une boutique à Cherbourg en propre. Nous réalisons de plus en plus de ventes via notre site internet – plus de 700 000 euros de CA-. Nous avons 60 revendeurs en France multi-marques, nous sommes présents dans de belles enseignes réputées tels les Galeries Lafayette, le Bon Marché, dans des boutiques Saint James, dans des maroquineries. Il s’agit donc de très belles boutiques plutôt orientées vers le made in France et le luxe.  Nous avons aussi une activité importante dans le domaine dit des cadeaux d’entreprises. Nous travaillons pour plusieurs grands groupes dont LVMH, Richemont, qui commandent des pièces qu’ils offrent à leurs clients, à des fournisseurs ou encore à des collaborateurs. C’est un secteur et une activité qui marchent bien. Nous travaillons aussi pour des industries et on décline en fonction des marques. Enfin, nous gérons aussi des licences de marques. On collabore ainsi avec Saint James, la Présidence de la République, l’Elysée, la Marine Nationale, la Gendarmerie nationale, Bleuet de France, 1083…
Des parapluies vendus dans de nombreuses boutiques. Comme ici à Belleville à Paris.

– FFI : belle stratégie de marque !

  • CY : Oui, j’y suis très attaché. Je veille aussi bien à rajeunir l’esprit de la marque qu’à en conserver l’esprit luxe. J’ai passé des contrats de collaboration dans ce sens avec Stromae, OrelSan et je suis en lien avec un célèbre Youtubeur. Je n’ai pas de stratégie gravée dans le marbre. Mais je travaille sans arrêt sur la visibilité, la notoriété et le rajeunissement de la cible. Ce triptyque est important. Il se fait au feeling, aux rencontres, à l’opportunisme.
  • FFI : Quid de l’international ?
  • CY : C’est compliqué depuis la covid. Juste avant le premier confinement, j’avais signé un gros contrat au Japon à Osaka, mais je n’ai pas pu y aller. Sur la Corée, le marché s’est aussi ralenti. Même constat pour les Etats-Unis. La zone Bénélux marche bien, en revanche. Je me suis donc recentré sur des pays limitrophes, plus faciles à attaquer en tenant compte du contexte sanitaire actuel. Et je ne le regrette pas : l’export quand on n’y va pas, on ne vend pas ! C’est aussi simple que cela ! Je suis, par ailleurs, aussi conseiller Expert Commerce Extérieur. J’ai été nommé par le Premier ministre par un décret en août 2020.

« On n’a pas été au bout de la durée de longévité de notre parapluie ! »

– FFI : Le parapluie de Cherbourg est-il un produit qui a évolué ? 

  • CY : Oui !  La marque au départ était le Véritable Cherbourg. J’ai changé le nom en mars 2020, pour le rebaptiser Le Parapluie de Cherbourg, donc. Dans les années 80, nos modèles résistaient à un vent de 80 km/h de face. Aujourd’hui, pour les modèles de la gamme classique, la résistance face aux mêmes conditions est montée à 156 km/h. Le produit est donc de plus en plus résistant. L’imperméabilité, elle, est restée stable. Elle est surtout devenue plus écologique ! Dans les années 80,  il faut bien l’avouer, on regardait moins ce que l’on mettait dessus… On avait des produits plutôt costauds…Aujourd’hui, l’écologie est au cœur de notre action. Je suis très engagé à tous les niveaux à ce sujet. Notre SAV permet de réparer tous les produits et ce à un prix quasiment coutant. Nous avons le souci que les gens récupèrent leurs parapluies quand il y a un problème. On ne les jette pas dès qu’ils sont un peu cassés ou abîmés. On fait tout pour qu’ils soient réparés. Nous sommes organisés et équipés pour envoyer des boîtes de réparation à nos clients quand ils en ont besoin et ils nous les renvoient avec le parapluie à l’intérieur  !  Nous réparons et renvoyons. Tout ce qui est carton, est en carton recyclé. Tous les tissus et les bois que l’on utilise sont certifiés.  La durée d’un parapluie dépend de la manière dont on l’entretient. On voit des parapluies qui datent de 1986 et qui ont eu juste une petite réparation. Pour l’instant, on n’a pas été au bout de la durée de vie du produit ! Notre objectif  est clair : proposer un produit résistant et élégant qui se transmet de génération en génération. Cet objet fait partie du patrimoine familial.
  • FFI : Quel est le prix d’un parapluie ? 
  • CY :  Cela commence à 139 euros. Le prix moyen est de 150 euros. On pourrait faire 3 ou 4 collections par an. On ne fait que des couleurs unies. Nos clients trouvent le prix justifié lorsqu’ils visitent notre atelier qui est ouvert au public. Ils sont en moyenne 15 000 par an à en franchir le seuil. Nous utilisons des matériaux de qualité. Quand on a le produit en main, quand on le voit se fabriquer,  on réalise encore mieux qu’il n’y a pas tromperie sur la marchandise. On peut aussi garantir ces prix, car nous vendons en direct donc il n’y a pas 36 000 intermédiaires entre le client et nous.

Je suis très attaché au Made in France

  • FFI : Pourquoi avoir rejoint les FFI ? 
  • CY :  Il y a des valeurs que je porte par rapport à mon éducation, à mes valeurs et à mes engagements. Je suis très attaché au Made in France. Et à la souveraineté économique de notre pays. Nous équipons le Président de la République, avec un parapluie sécurité phare de notre gamme, le ParaPactum que l’on exporte.  Pour revenir aux FFI, c’est un réseau d’entrepreneurs sympathiques. C’est convivial. Un entrepreneur est souvent seul face à ses choix. Il ne peut compter souvent que sur lui pour se développer. Il est appréciable de se retrouver parmi ses pairs. Dans la vie d’un entrepreneur, il y a  aussi plusieurs étapes : celle où l’on apprend, celle où l’on se prend des portes, puis vient la phase de la réussite et de la transmission. Ce réseau permet de rencontrer différentes générations. Je suis là aussi pour aider : faire gagner du temps ou remotiver si besoin. J’aime apprendre, écouter et partager des expériences.
  • FFI : Comment avez-vous rencontré les FFI ? 
  • CY : Cela fait longtemps que je connais Gilles Attaf. J’ai fait avec lui et Belleville une très jolie collaboration avec un parapluie en flanelle.  Je suis au conseil d’administration d’Origine France Garantie. Je suis à l’Arsen (Association Régionale des Savoir-faire d’Excellence Normands) et proche des douanes. J’ai découvert naturellement Laurent Moisson, Franck Glaser, Emmanuel Deleau par la suite.

Créer un club FFI en Normandie

– FFI : Quel est le rôle des FFI en Normandie ? 

  • CY : J’en parle dans les réseaux d’entrepreneurs. Mais pour l’instant, il n’y a pas d’antenne en Normandie. J’ai eu quelques appels du pied pour la créer et en prendre la présidence, mais j’ai déjà un emploi du temps ultra chargé. C’est très intéressant mais ce serait totalement déraisonnable pour moi. Si c’est pour faire cette présidence des bouts des doigts, ce n’est pas la peine !  Il faut y être corps et âme, comme dirait Gilles. Je n’en ai pas le temps, je le sais. J’ai proposé un nom que je pourrais soutenir. En back-office, je suis plutôt bon ! Ça ne m’ennuie pas d’être derrière ! Si je n’en suis pas le président, cela n’en sera que mieux ! Avec les FFI, on défend les mêmes valeurs de fabrication française. Et du service aussi. Je ne suis pas forcément très assidu aux cocktails, j’en ai fait un ou deux à Paris, un à Bordeaux. Mais je trouve que les FFI ont une très bonne dynamique. On a besoin d’être en local aussi avec les antennes. Ça permet aux entreprises d’être plus proches, certaines d’entre elles  ne se seraient peut-être pas rencontrées sans les FFI. C’est un beau club qui porte de belles valeurs. »

A voir aussi : la vidéo récente que Charles Yvon a tourné pour Brut et qui dévoile notamment le parapluie destiné au Président de la République. Il coûte 12 000 euros. Il pèse 2,3 kilos et il comporte 190 pièces ! – Ici

PS : Charles Yvon participera le 8 juin prochain avec Laurent Moisson à la conférence organisée par l’Attitude Manche sur le thème : la Manche, nouvel eldorado du changement de vie ? L’inscription est gratuite : elle se fait par ce lien – Ici

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