J’ai eu la surprise d’être invité par le salon Paris Retail Week afin de débattre avec la marque Shein. Il y a 1000 personnes plus légitimes que moi pour ferrailler avec le nouvel ogre de la mode jetable. 10 000 experts qui pourraient mieux analyser leur modèle, le condamner, et imaginer des parades. Mais les organisateurs voulaient inviter « la plume des Forces Françaises de l’Industrie ». Alors, mon ego l’ayant emporté sur mon complexe d’imposteur, j’ai dit oui.

Thomas Huriez, un entrepreneur créatif, engagé, responsable.

J’y retrouverai l’un des membres FFI de la première heure, Thomas Huriez. Lui incarne l’une des alternatives possibles au modèle destructeur que le géant chinois du textile a poussé à son paroxysme.

À la surconsommation, il oppose la durabilité et le recyclage. Face à l’opacité des méthodes de production et des conditions sociales en vigueur chez ce Goliath, Thomas a ouvert les portes de la transparence. Tout le monde sait tout sur les matières qu’il travaille, leur provenance, les lieux de production, les conditions de travail…

À l’heure où nous voulons tous que les pratiques prédatrices de certaines entreprises cessent, il est clair que ceux qui écouteront notre débat donneront raison à Thomas.

1083, la marque qu’il dirige, c’est le type d’entreprises que réclament les jeunes dans leurs marches pour le climat. C’est le modèle social que leurs parents veulent voir fleurir. Pour réirriguer l’économie de nos territoires, participer au financement de nos solidarités, relancer l’ascenseur social. Thomas incarne ce que les élus aiment mettre en avant : un entrepreneur créatif, engagé, responsable. Il met l’entreprise au service du bien. Tout simplement.

Un monde plus respectueux, plus durable, plus heureux.

Oui, mais voilà, sur le plateau de la PRW, tout à l’heure, l’entreprise qui réalise plus de 20 milliards de $ de chiffre d’affaires ne sera pas 1083. Ce sera Shein. Celle qui a vu exploser ses revenus pendant les confinements, ça n’est pas 1083. C’est Shein. Ceci au moment même où, rappelez-vous, nous étions des dizaines de millions à nous dire qu’il fallait tout changer pour « un monde nouveau ». Un monde plus respectueux, plus durable, plus heureux.

Un monde pour lequel nous élevons, chaque année, les contraintes environnementales des industries qui sont établies sur notre sol… Tout en laissant entrer en grand les produits de celles qui n’en ont cure. Planquées dans des pays dictatoriaux ou suffisamment corrompus pour qu’on ne puisse contrôler leurs pratiques, elles exploitent à fond l’un des traits éternels du genre humain : Son incroyable hypocrisie.

L’hypocrisie de notre jeunesse qui se fait livrer des dizaines de produits fruits de la destruction du climat et de l’exploitation de la misère humaine avant d’aller bloquer son lycée pour protester contre le réchauffement climatique.

Celle de leurs parents qui, pour laver leur ultra-fast conscience, fait voter des lois qui rendent la vie dure aux entreprises installées dans nos régions tout en tolérant la surconsommation de leurs rejetons moralisateurs.

Celle de certains de nos élus qui se vautrent depuis des décennies dans la symbolique momentanée d’une posture ou d’un texte tendance, en se moquant de ses conséquences à long terme. Conséquences sur les délocalisations d’usines qui ont fini par aller polluer ailleurs et bien plus.

Intervention au Paris Retail Week.

Tous ces gens, nous tous, estiment que notre époque est plus consciente, plus responsable que les précédentes. Le sens, l’éthique même, sont dans tous les discours.

L’éthique… Il m’arrive, pour rigoler, de dire qu’elle n’est finalement qu’un ensemble de valeurs desquelles on ne déroge jamais… sauf à partir d’un certain montant d’argent.

La différence de prix entre un t-shirt Shein et un t-shirt 1083 n’est que de quelques euros. J’aurais imaginé que nous vendrions nos principes un peu plus chers.

À tout à l’heure pour la Paris Retail Week.

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