C’est l’impression que m’a laissée la passionnante FFI Académie consacrée au foncier industriel de lundi dernier. Laurent SABATUCCI, fondateur d’EOL , et Virginie SAKS, ambassadrice des FFI, avaient pourtant débuté leur exposé par de bonnes nouvelles. Le nombre de projets industriels est clairement reparti à la hausse dans notre beau pays.

Plusieurs Giga-factory arrivent, ainsi que de nombreux petits projets d’usine. Ce qui manque ce sont les projets de taille moyenne, qui sont généralement portés par des Entreprises de Taille Intermédiaire. Pas très étonnant quand on sait que le nombre de ces ETI est, en France, deux fois moins grand que dans les pays voisins.

Mais, malheureusement, notre leadership incontesté en matière d’adoption de réglementations absurdes menace de faire avorter la plupart de ces projets dans les prochaines années.

La principale responsable est la loi ZAN

Cette loi de 2021 est pleine de bonnes intentions. Comme souvent chez nous. Nos politiques, sous l’aimable pression de notre conscience écologique grandissante, voulaient protéger la biodiversité et réduire les îlots de chaleur. Ils en ont déduit qu’il serait efficace d’interdire progressivement, d’ici 2050, l’artificialisation nette des sols. L’artificialisation nette, a rappelé Virginie Saks, veut dire que si vous artificialisez 1 m², vous devez rendre 1 m² de terrain artificiel à la nature.

Le problème est qu’en pratique, cela fait qu’il n’y a plus, aujourd’hui, de terrains disponibles pour installer des usines, même vertes, dans de nombreuses régions.

Et les choses ne vont qu’empirer dans les prochaines années si rien n’est fait

Pourquoi ?

Parce qu’étant obligées de choisir entre les projets d’infrastructure, d’habitation et les projets logistiques ou industriels, les collectivités locales choisissent généralement de sacrifier les derniers. Des collectivités vent debout contre ces contraintes. Malheureusement, elles y sont soumises.

La vraie conséquence de cette situation, rappelle Laurent Sabattucci, c’est qu’on se met dans une logique de décroissance industrielle. On réduit de fait le nombre d’implantations par une contrainte excessive sur le terrain.

Voilà pour le principal de nos problèmes sur le foncier. Le principal, mais pas le seul. Il faut ajouter, nos délais administratifs habituels :

  • Les navettes incessantes entre la multitude de nos services administratifs impliqués dans chaque projet prennent beaucoup de temps.
  • La succession des études demandées allonge encore les délais.

En France, des associations arrêtent des projets pour de simples soupçons

Conclusion, nous instruisons un dossier d’implantation en moyenne en 18 mois contre 8 mois en Allemagne !

Et c’est sans compter sur l’instabilité juridique que notre législation entretient. Car à chaque étape du projet, des recours peuvent être déposés. Certains projets peuvent ainsi mettre des années à voir le jour. Laurent Sabatucci en a vu qui ont duré 7 ans, 10 ans, quand ils ne sont tout simplement pas abandonnés par leurs porteurs, lassés par la complexité administrative de notre pays.

Ailleurs, chez nos voisins, les recours sont encadrés. Chez nous, des associations arrêtent des projets pour de simples soupçons. Un des intervenants du webinaire a cité l’exemple d’un soupçon de présence d’espèces protégées. Rien ne prouvait qu’elles étaient là, mais le projet a été arrêté, le temps qu’on prouve le contraire. Un autre chantier a été arrêté pour demande de fouilles archéologiques alors que des bâtiments, rasés entre-temps, préexistaient avant le début des travaux.

Autre problème : l’incohérence des objectifs des services déconcentrés de l’État

Elles s’empêchent parfois mutuellement d’agir. « Avant, rappelle Laurent Sabatucci, on avait les préfets. Ils agissaient comme arbitres quand les agences de l’État et les collectivités n’étaient pas d’accord. Mais comme on a rendu la DREAL (Direction Régionale de l’Environnement) indépendante, plus personne ne peut lui forcer la main. »

Or, ces agences n’ont pas pour mission de se soucier de la relance de notre secteur industriel. « Ça n’est pas leur objectif », rappelle Laurent Sabatucci.

Bilan, cette autorité puissante et hors de contrôle est capable de faire échouer même quand les collectivités locales, l’État et les populations sont pour un projet.

La conséquence de ce triste constat est que les terrains se raréfient

Alors, le prix du foncier industriel explose (multiplié par trois en un an et demi).

La réhabilitation des friches est une solution, évidemment. Mais elle n’est pas suffisante. Elles pourront répondre à 10 ou 15 % de la demande, guère plus, estime Laurent Sabatucci.

Par ailleurs, les villes ayant grandi, beaucoup d’entre elles se trouvent en territoire urbain. Elles sont alors soumises à des contraintes d’urbanisation qui ne sont pas toujours adaptées à l’industrie.

Ajoutez à cela qu’elles sont souvent polluées, aimantées et mal desservies. Leur réhabilitation coûte cher.

Des solutions de verticalisation sont aussi à l’étude

Mais malheureusement, il n’existe pas encore de solution réellement industrialisable en la matière. Si des textes de lois abordent le problème de l’artificialisation des sols dans les pays voisins, aucun ne le fait de façon aussi dogmatique et radicale que chez nous. L’artificialisation des sols peut respecter la biodiversité.

« Elle peut même, quand elle est bien conçue, la favoriser », a conclu Laurent Sabatucci.

En créant des bassins, en amenant de l’eau, en organisant correctement les flux, on a vu des espèces se réinstaller. Surtout quand les espaces ainsi aménagés ne sont plus traités avec des pesticides.

« Plus personne n’artificialise en bitumant les terrains à 80% »

Voilà donc un nouvel exemple des ravages de notre système kafkaïen. Espérons que la simplification des procédures promises par le gouvernement traitera de cet épineux problème du foncier, comme l’espère Virginie SAKS.

En attendant, si vous avez un projet, vu l’incroyable casse-tête juridico-administratif par lequel vous allez passer, n’oubliez pas de vous faire accompagner par des professionnels !

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